Il faut bien se rendre à l’évidence, mon premier projet de création d’association, est un fiasco. Cela est d’autant plus rageant que je n’ai même pas pu franchir la première étape de son lancement.
L’objectif de cette activité à but non lucratif, était de créer une association proposant des évènements ludiques et éducatifs aux enfants pris en charge dans les Maisons d’Enfance à Caractère Social (ou M.E.C.S) : exemples, ateliers maquillage/cuisine, spectacles, défis sportifs…
Ce projet me tenait particulièrement à cœur car il me permettait de réaliser indirectement le souhait de ma grand-mère maternelle dont j’étais très proche et qui est malheureusement décédée. Celle-ci rêvait d’ouvrir un orphelinat ou à défaut une structure permettant d’accueillir des orphelins quelques heures par semaine afin de leur offrir de petits moments de bonheur.
Mais avant de nous lancer, nous avons soumis notre idée à nos professeurs afin d’obtenir leur avis, voire leur aval. Bien que séduits au début, ils ont rapidement qualifié notre démarche, de projet « Miss France » c’est à dire de projet bienveillant mais totalement irréaliste.
Cet avis négatif et décourageant, m’a piqué au vif et personnellement touché pour les raisons déjà exposées. Furieuse, avec mes camarades nous avons décidé de continuer quand même, ne serait-ce que pour leur prouver qu’ils avaient torts et que ce projet était viable.
Après plusieurs « brainstorming », nous avons identifié les 3 conditions nécessaires à la mise en œuvre de notre projet associatif, en l’occurrence :
- trouver des Maisons d’Enfance à Caractère Social (ou M.E.C.S) acceptant d’accueillir nos actions dans le cadre d’un partenariat,
- recruter des bénévoles acceptant de préparer et d’animer les actions proposées dans les Maisons d’Enfance partenaires,
- collecter les fonds nécessaires au lancement du premier évènement et en cas de succès, au financement des évènements suivants.
Pour nous motiver et mettre notre projet associatif, nous avons fixé la date du 1er évènement au dimanche 18 février 2024. Nous avons ensuite rédigé un kit de communication (mailing, support de présentation) présentant notre association, nos actions et notre calendrier aux Maisons d’Enfance à Caractère Social afin de faciliter leur démarchage.
Pour ce qui est du recrutement des bénévoles, nous avions prévu de solliciter :
- les membres du Bureau des Etudiants Artistiques (BDA) pour nous aider à préparer et animer les activités artistiques/ludiques et éducatives
- les membre du Bureau des Etudiants en Sports (BDS) pour nous aider à préparer et animer les défis sportifs. Pour ce qui de la collecte des fonds nécessaires au lancement du premier évènement et au financement des évènements suivants, nous avons prévus de :
- Solliciter les dons des entreprises de nos alternances respectives en mettant en avant le caractère social/solidaire de notre action et en associant leur nom sur tous nos supports de communication (affiche, site internet, réseaux sociaux),
- d’ouvrir nos évènements au grand public (et en particulier les familles) afin collecter des fonds supplémentaires via la vente de boissons/friandises/goûters et dons.
Après avoir établi ce plan d’actions, nous avons commencé à démarcher les Maisons d’Enfance à Caractère Social de la région parisienne afin de trouver celle qui accueillerait l’évènement du 18 février 2024. Nous les avons d’abord contactés par mail en leur transmettant notre kit de communication puis relancer par téléphone. Je dois dire que le premier contact a été difficile à établir car les responsables de ces structures sont difficiles joignables car en effectifs réduits et très sollicités. Lors de nos échanges mails/téléphoniques et contrairement à ce que nous pensions, nos correspondants faisaient preuve de peu d’enthousiasme face à notre démarche.
En plus, certaines des Maisons d’Enfance à Caractère Social contactées étaient hors cible car elles accueillaient principalement des adolescents. Malgré cela, nous avons continué nos démarchages dans l’espoir d’obtenir un rendez- vous qui nous permettrait de convaincre une Maison d’Enfance à Caractère Social, de l’intérêt de notre projet pour les enfants qu’ils accueillent. Or, leurs responsables n’étaient pas disponibles lorsque nous l’étions et inversement. Malgré ces conflits d’agendas, nous avons réussi à placer quelques rendez-vous mais ceux-ci étaient ensuite soit annulés, soit reportés. Tout était donc à refaire. Lors du dernier échange téléphonique avec un responsable de Maison d’Enfance à Caractère Social, nous avons tous déchanté.
Bien que touchée par notre démarche, cette personne nous a expliqué qu’elle n’avait pas besoin de ce type d’initiative. En effet, les enfants que sa structure accueillent, sont souvent des enfants en grande détresse psychologique et/ou éducative en raison du traumatisme causé par leur abandon subi, la séparation de leur famille (placement) ou leur histoire personnelle (violence). Pour les aider à se sentir mieux dans leur peau, à grandir et devenir des adultes autonomes et responsables, ces enfants ont en priorité besoin de l’aide de professionnels comme des psychologues, pédopsychiatres, éducateurs/enseignants spécialisés. Selon elle, ces enfants n’ont pas besoin que nous leur organisions une « kermesse » de temps en temps, même si cela part d’un bon sentiment. Ce responsable a également insisté sur le fait que nous et nos bénévoles n’étions absolument pas formé à la gestion d’enfants difficiles à encadrer et parfois violents.
Pour notre sécurité et la leur, il nous a conseillé de laisser agir ceux qui sont formés au contact de ce public particulier. Par conséquent et à moins que nous sachions où et comment trouver rapidement les professionnels qu’il recherchent, ce responsable nous a clairement dit que notre projet ne servait à rien et qu’il refusait d’y participer.
Face à ce projet « mort-né », j’étais à la fois furieuse/honteuse d’avoir été aussi naïve et aveugle face aux avertissements de mes professeurs. Mais il fallait bien se rendre à l’évidence, ils avaient raison. Il fallait maintenant assumer cet échec et annoncer l’abandon du projet.
Cette annonce fut faite le 14 décembre lors de la présentation à nos professeurs et camarades de notre étude de faisabilité.
En rédigeant cette étude notamment l’analyse de risques dont j’étais chargée, j’ai réalisé que notre projet comportait trop de risques non maîtrisables, comme notre manque de formation/expérience, l’absence de contacts/de support de professionnels de l’enfance en difficulté (éducateurs, psychologues, pédopsychiatres),
Avant de nous lancer, nous aurions dû faire davantage de recherche sur ce sujet en nous entourant en plus de l’avis d’experts.
Avec une meilleure connaissance de notre cible et l’appui/encadrement de professionnels de l’enfance bénévoles, nous aurions peut-être pu proposer un service plus adapté aux besoins des Maisons d’Enfance à Caractère Social. Ce service « sur mesure » aurait probablement facilité nos échanges et l’organisation d’un premier évènement.
Sur le coup cet échec m’a conduit à me remettre en cause, voire à douter de mes capacités. Mais après réflexion, il m’a aidé à réaliser ce que devait être une activité, en l’occurrence un projet réaliste/réalisable, répondant à une véritable attente et porteur de valeur ajoutée.