Vendredi 11 octobre 2019 – Je suis choquée, révoltée, attristée, fatiguée. Les sentiments se mélangent, lorsque je lis qu’un porte-parole du rassemblement national réclame à la Présidente de demander à une accompagnatrice en sortie scolaire « de retirer son voile islamique » et souhaite qu’elle quitte la salle « au nom de nos principes laïcs ».
Écrire n’est pas dans mon habitude, mais on m’a dit qu’écrire est une arme, alors je m’empresse de saisir ma plume pour vous parler en toute honnêteté.
Cette date a ouvert un tollé médiatique et a libéré l’avis de millions de gens.
Certaines personnes, couvertes derrière une liberté d’expression en ont profité pour dire tout haut ce qu’il pensait tout bas, jusqu’à maintenant.
Certaines chaînes, se sont données à cœur joie d’enchaîner les informations sans vraiment les analyser, le plus important pour eux, ce sont deux ingrédients : remplir l’antenne et le BUZZ ! La recette inratable pour faire des amalgames entre l’islam et l’islamisme.
Alors qu’au fond, il n’y a pas de quoi rire, c’est blessée que j’observe.
La mauvaise lumière des projecteurs
Que j’observe ma religion une nouvelle fois propulsée à l’avant -scène, je ne comprends pas, j’y vois une déformation du regard porté vers l’Islam. Assimilé à des mots : radicalisme, extrémisme, terrorisme, tout c’est suffixe en -isme qui ont perdu de leur sens. Assimilé à une dualité « Islam-Violence », finalement, je constate que les écrits sont composés de vulgaires pamphlets qui abordent la question de l’Islam qu’à travers des simplifications réductrices. La sphère média-politique a malheureusement réussi à instaurer une bijection entre l’Islam et les actes de personnes qui ont eu une lecture erronée de ma religion, dont sa signification arabe n’est autre que « la paix ».
Oui, vous avez bien lu, pendant que la lumière du projecteur est braquée sur le mauvais côté de l’Islam, je tiens à éclaircir que c’est une religion de paix, de tolérance, d’humanisme et de fraternité universelle.
Tout est possible à qui n’abandonne jamais
Benjamine d’une fratrie de quatre sœurs, fille de parents immigrés : un père ouvrier et une mère au foyer, j’ai eu la chance d’avoir le modèle de mes sœurs. Ingénieur, responsable RH chez L’Oréal après être diplômée de Science PO, ou encore contrôleuse de gestion, elles sont jusqu’à maintenant ma source de motivation, et la preuve de la citation « tout est possible à qui rêve, ose, travaille et n’abandonne jamais »
Moi, c’est Mariem, Banlieusarde et fière de l’être comme dirait Kerry James. J’habite à Gennevilliers. La ligne 13 (cette fameuse ligne héritée du titre « de la pire ligne, la plus anxiogène ») me relie à la capitale. 9 stations plus tard, j’atterris sur l’avenue mythique des Champs-Élysées. Des réalités de vie totalement différentes et un contraste social assez particulier, pourtant c’est dix petits kilomètres qui nous séparent. En banlieue, on ne s’en rend pas forcément compte, surtout que j’ai la chance d’habiter dans une ville très hétéroclite. Je l’ai donc jamais ressenti. C’est en allant à Paris que je me suis rendu compte de ce décalage.
Je suis épuisé, que l’on s’arrête au tissu sur ma tête.
Je suis attristée, de voir une stigmatisation des jeunes de banlieue.
Parce que je suis avant tout une personnalité, une identité.
Et comme tous, j’ai une histoire, un vécu, une opinion, des projets, des ambitions, en gros, je suis un humain.
Le déferlement brun
Pourquoi un tel harcèlement, un tel déferlement de haine ?
Pourquoi vouloir nous exclure de la société ? : exclus de pouvoir travailler où je veux, exclus d’exercer mon devoir de citoyenne.
Voilà les questions auxquelles je suis confrontée.
Avant, j’étais perçu comme une « banlieusarde », maintenant comme une « voilée », ou pire les deux à la fois. On m’a laissé comprendre que je devais revoir mes ambitions à la baisse, qu’avec un foulard ça serait compliqué de trouver un stage, une alternance ou un travail, que je ferai mieux de le retirer. J’ai ce sentiment de devoir à en faire plus que les autres, comme si avoir la possibilité de le garder était une faveur qu’on me faisait.
Consciemment ou inconsciemment on nous renvoie systématiquement à la même chose, on nous réduit à ce qu’on a sur la tête plutôt de chercher ce qu’il y a dedans. Je suis perdue, à l’école de la république, j’ai appris la Liberté, l’Égalité et la Fraternité.
Alors, j’aimerais que ça ne soit pas que des mots.
Oppressée, par certains qui veulent définir à ma place la notion de liberté, je le dis haut et fort : chacun devrait être libre de porter ce qu’il veut dans la mesure où cela découle d’un choix personnel. Je souhaite pour ELLES, la liberté de se vêtir comme elles le souhaitent, sans que qui que ce soit puisse leur imposer de faire autrement.
De nature pudique sur mes sentiments, j’ai toujours refusé de m’exprimer sur ce sujet, car je n’ai pas à me justifier, je n’ai pas à convaincre qui que ce soit. C’est mon choix personnel, que j’aimerais à ne pas devoir exposer publiquement.
Petite anecdote : lors du choix de sujets pour notre projet de reportage, une de mes camarades voulait en parler, j’ai naturellement refusé. Pourquoi ça serait le seul sujet sur lequel je pourrais m’exprimer ? Pourquoi je devrais assumer ce rôle de militante ?
Je n’ai commis aucun crime
Je me sens comme au tribunal à devoir justifier à la barre de mon acte, pourtant je n’ai commis aucun crime. Je ne suis le porte-parole de personne et je ne représente personne.
Je suis seulement un être, à la recherche de cette liberté. J’aime m’en aller le temps d’un week-end, démarrer ma voiture et me diriger vers les pays voisins: Pays-Bas, Belgique, Suisse, Allemagne, je galope de pays en pays en espérant trouver une chose: le fameux « vivre- ensemble ».
Optimiste, je préfère voir le verre à moitié plein plutôt qu’à moitié vide.
Alors, je crois en un monde qui continuera ses progrès scientifiques, un monde qui se perfectionnera dans la technologie mais surtout un monde qui finira par comprendre que le foulard ne réduit nullement les facultés intellectuelles.
Le verre à moitié plein
Lorsque je vois ses discours tenus dans les assises politiques de Notre France, je me demande comment en est-on arrivé là ?
Notre France, qui est construite par des ouvriers venue de tous les côtés.
Notre France, qui nous représente de la rue du Maroc, en passant par la place du Brésil, en détournant par la rue de la Chine.
Notre France, ou nous pouvons manger indien, libanais, japonais, mexicain, italien.
C’est cette diversité que je veux retrouver dans les mœurs de ma société.
Notre France, doit nous rassembler, nous réunir et cesser de diviser.
Mariem n’est pas voilée, Mariem porte un foulard. Mariem n’est pas voilée, mais ce sont les yeux et les cœurs de beaucoup qui le sont.
Mariem est métissée : Musulmane-Française, double identité on me regarde comme une schizophrène de l’humanité. En réalité, je suis une citoyenne, dotée d’une liberté et qui inéluctablement mérite le respect.
Il existe autant de femme que d’histoires, celle-ci est la mienne, ne l’oubliez pas.
Mariem