novembre 18, 2021

NEJDMA > Destination de rêve, comment le luxe côtoie la misère

La république dominicaine et ses plages de sable blanc c’était mon rêve mais une fois arrivée là-bas, j’ai totalement déchanté. Au fur et à mesure de mon voyage, je me suis rendue compte que derrière tous ces hôtels de luxe se cachait une population qui vivait dans la misère et cette situation m’a rendue extrêmement mal à l’aise.

Une manne touristique qui ne profite que très peu à la population

La république dominicaine est la destination de vacances la plus populaire des Caraïbes. De ce fait, le marché du tourisme est la source de revenu la plus importante de ce pays. Pour un séjour all inclusive de dix jours dans un hôtel, nous avons déboursé environ deux mille euros par personne sans compter le prix des excursions et des activités. Ce voyage représentait un certain coût pour mes parents, nous comptions donc profiter au maximum de ces vacances. A mon arrivée dans l’hôtel, j’ai été tout de suite émerveillée par les différentes piscines, les chambres spacieuses, l’abondance des buffets, les différents restaurants proposant des spécialités culinaires du monde, les palmiers, le bleu de la mer, les services de massage et de thalasso.

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Beaucoup de dominicains travaillent à faire marcher ces énormes machines à touristes. Un personnel discret, limite craintif et avec lequel il est difficile voir impossible d’entrer en interaction. En me renseignant, j’ai appris que ces derniers étaient extrêmement mal payés en comparaison des revenus tirés par le tourisme. Certains travaillent plus de 60 heures par semaine pour un salaire qui peine à subvenir à leurs besoins. Mais comment profiter de ce séjour de rêve en sachant que cette industrie laisse les gens qui la font marcher dans la pauvreté ? Parmi tous les touristes, j’étais bien la seule à me poser ce genre de questions. J’avais la désagréable sensation d’être une privilégiée dorlotée par une armée de serviteurs. Disons qu’au niveau du thermomètre de la culpabilité, il faisait chaud.

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Ghetto à touristes ou quand les agences de voyages conseillent de rester dans l’enceinte des hôtels

Pendant tout le séjour, on nous à rabâché qu’il était dangereux de sortir seul en dehors de l’enceinte de l’hôtel. Nous étions invités à ne participer qu’aux seules excursions proposées par l’hôtel. C’était assez dérangeant car nous étions “harcelés” aux quatre coins de l’hôtel par des guides qui voulaient absolument nous vendre des activités et des visites. Des amis de mon père ayant déjà voyagé en République Dominicaine nous avaient recommandé de passer par Rayana Sun, une société d’excursions créée par deux françaises. C’est par ce biais que nous avons pu sortir accompagnés d’ hôtes très sensibles aux réalités du pays et disposés à nous montrer un peu de l’envers du décor.

Notre première sortie en dehors de l’hôtel a été la visite d’une plantation de canne à sucre avec un guide local qui nous a expliqué que les terres appartenaient à des propriétaires américains. Il est important de préciser que la République dominicaine est une ancienne colonie où s’est développée la culture de la canne à sucre et avec, l’importation d’esclaves africains. Aujourd’hui ce sont toujours des dominicains de couleur qui travaillent dans les plantations, tandis que la communauté dominicaine blanche, descendante des colons espagnols, tient les hauts postes du pays. Malgré une révolte des esclaves en 1791 et l’abolition de l’esclavage en 1793, il apparait que depuis cette période, la situation des dominicains de couleur n’est pas vraiment changé. Ces derniers sont la plupart du temps relayés aux tâches subalternes pour des salaires de misère.

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Nous avons également visité un village. Nous avions emmené des vêtements et des jouets pour les enfants. Cela a été certainement le moment le plus marquant de ma vie. Lorsque j’ai vu ces enfants se battre entre eux pour récupérer les jouets que nous avions ramené et nous arracher littéralement les sucettes des mains. Je me suis retrouvée devant un spectacle déchirant. Il y a eu comme un carambolage dans mon esprit. Après cette incursion dans ce village misérable, moi j’allais retrouver mon hôtel de luxe et dîner dans un de ces restaurants thématiques (en l’occurrence, ce soir-là japonais) alors qu’à quelques kilomètres ces enfants ne mangeraient peut-être pas à leur faim. Ces hôtels étaient en fait de vastes territoires de rêve pour touristes, installés au milieu d’autres territoires de misère.

Exploiter tout ce qui est exploitable

Le voyage touche presque à sa fin et mes parents me font le cadeau d’une dernière activité “nager avec des dauphins”. Je ne me rendais pas compte de la bêtise de cette activité sur le moment. Je découvre que les dauphins sont en captivité dans des installations artificielles conçues pour la rencontre avec les humains. Pour être honnête avec vous, dans des bassins minuscules. Nous avions l’interdiction de prendre des photos donc aucune possibilité de témoigner de l’exploitation de ces animaux. Il faut savoir que la prestation d’une demi-heure à dix dans un bassin coûte 195 € par personne et que les dauphins sont sollicités toute la journée.

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Avec du recul, j’ai compris et je me suis promise que je ne retenterai plus jamais ce genre d’expérience. Voir que les dauphins sont récompensés avec des sardines lorsqu’ils exécutent les tâches demandées ne m’est pas apparu au final si fun que ça. Ces derniers, à l’état sauvage, parcourent une centaine de kilomètres par jour. Ils ne sont pas faits pour vivre dans des bassins en béton. Il est important de se renseigner sur l’impact sur les animaux avant de vouloir dépenser des sommes astronomiques pour ce genre d’activité. Je sais désormais que je privilégierai les excursions dans lesquelles il est possible de rencontrer ces animaux dans leurs milieux naturels et en les respectant, ce qui est, selon moi, tellement plus magique !

Destination de rêve, comment le luxe côtoie la misère

Aujourd’hui, je continue de voyager. Néanmoins les formules All inclusive, c’est terminé ! Je voyage pour découvrir de nouvelles cultures, visiter des monuments et surtout aller à la rencontre des habitants. Le voyage doit être le moyen de s’enrichir culturellement et humainement. L’idée de rester enfermée dans un hôtel, installée sur un transat en sirotant un cocktail dans un décor de rêve, m’a amené à m’interroger sur la société de consommation, le sens et l’utilité de l’existence. De plus, étant actuellement étudiante, j’envisage faire une année de césure afin de pouvoir réaliser des missions humanitaires à l’étranger.