Le maquillage, l’art d’embellir, mais aussi l’art de s’exprimer, est aujourd’hui bien plus qu’une façon de s’apprêter au quotidien, il est une manière d’exprimer sa beauté intérieure, sa personnalité, son humeur et son caractère. Un mélange de matières, de couleurs, une utilisation différente des produits et des pinceaux selon les personnes, les tendances, faisant la spécificité et la différence de chacun.
Hicham Barmaki, chercheur en éducation et développement humain dit « Le maquillage c’est avant tout masquer la réalité. », excellent exemple de ce que notre société est.
Le maquillage reflète l’art de la critique, du jugement. On dit d’une femme maquillée qu’elle est superficielle, que c’est une arnaque et on qualifie un homme maquillé de « pd ». Des mots durs, à l’encontre de la liberté de chacun.
Exprimer sa passion et sa beauté ou comment être montrée du doigt
Au collège, j’étais la fille de 13 ans aux multiples rouges à lèvres. Chez les filles, mon image a créé une forme de popularité, j’étais l’amie à avoir en quelques sortes. Chez les garçons, j’avais affaire aux moqueries. À 13 ans déjà, le jugement était présent dans la cour de récréation et on m’avait déjà collé l’étiquette de la fille superficielle, on a décidé de me jeter dans cette case. Ma famille quant à elle essayait de me remettre sur le droit chemin, on essayait de faire de moi l’adolescente banale, pas celle qui porte des couleurs qui ne sont pas de son âge.
À 13 ans, je trouvais ça normal, j’avais compris que la société était faite de cette manière, qu’à mon âge, ce n’était pas normal à leurs yeux de porter un rouge à lèvre violet ou d’avoir du fard à paupière.
Je ne cherchais évidemment pas à me faire remarquer comme beaucoup le pensaient, j’étais seulement passionnée, j’exprimais ma personnalité à travers ma mise en beauté, j’étais tout simplement moi-même.
Superficielle ou populaire ?
Au lycée, je passais plus inaperçue, j’ai gardé ma petite popularité auprès des filles, et j’ai cette fois atteint les garçons. Ceux qui auparavant se moquaient étaient bizarrement attirés par ce qu’ils jugeaient superficiel.
Aujourd’hui en tant que jeune femme, c’est pire. Je me sens coincée dans une société qui évolue de manière antithétique. D’un côté, on prône la liberté et l’évolution de la façon de penser et de l’autre, on juge et critique.
« Mais pourquoi tu te maquille ? T’es plus jolie au naturel », « Tu gâche ta beauté », « T’es dégueulasse maquillée », « Fais voir ta tête démaquillée ».
Récemment, mon entraîneur de sport m’a dit « C’est comme si j’avais une voiture avec un moteur puissant et que je remplaçais ce moteur par un moteur faible, qui rend ma voiture nulle ». Ici, je devais comprendre que j’étais plus belle au naturel et que je gâchais ma beauté, comme si sa définition de la beauté devait être la mienne.
Le jugement et la critique peuvent porter atteinte à une personne, modifier ses comportements, ses pensées, ses choix et la pousser à se renfermer. En réalité, juger l’autre, c’est porter un jugement sur soi, juger c’est montrer que l’on a du mal à trouver son identité. Le jugement est naturel, on se distingue d’une personne, on remarque une différence, tout humain juge, le souci réside dans ce qu’il en fait. L’exprimer et s’en mêler ou craindre de heurter la personne, de se tromper, ou tout simplement de penser que ça ne regarde que lui.
Faire du jugement une force mentale
Le jugement a une facette positive. Passer outre est une forme de réponse, on trouve sa stabilité, on s’assume et on n’écoute que ses envies, un chemin vers l’épanouissement.
Le jugeant est-il un modèle de perfection ? Est-il épanoui ? Qu’est-ce-que cette personne vous apporte mentalement ? Ses idéologies impactent-elles votre vie ?
Aujourd’hui en tant que jeune femme, ces critiques ne m’atteignent plus, je réussis à m’exprimer à travers mon physique, exprimer mes joies, mes peines, mais surtout montrer qui je suis vraiment. Je continue d’apprendre des techniques, de tester de nouvelles choses, d’envisager un futur avec cette passion. Ces critiques sont devenues une force, en les écoutant et en entrant dans les normes de la société, je ne serais plus moi-même, cette forme d’universalité effacerait ma personne.
Il y a peu, j’ai teint mes cheveux en rouge pour casser mon quotidien monotone et sortir d’un « mood » qui ne me ressemblait pas. J’ai certes reçu de nombreuses critiques mais j’ai décidé de garder uniquement les quelques compliments que j’ai reçu. Cette teinture peut n’avoir aucun sens pour les autres, mais elle m’a permis de repousser de mauvaises ondes.
L’idée est alors d’avancer, qu’on plaise ou non, que l’on entre dans les canons de beauté de la société ou non, le principal est de se plaire à soi-même.
Inès