« Cancre dans une famille studieuse. » C’est comme ça que je me définissais plus jeune. J’ai grandi aux côtés de frères très studieux, qui ont eut une certaine régularité face au travail. Une aptitude qui s’est acquise grâce à ma mère, qui dès le plus jeune âge leur enseignait le programme scolaire en avance.
Étant le petit dernier d’une fratrie de 4 enfants, ma mère suivait moins ma scolarité voyant que ses autres fils étaient autonomes. Cependant, je ne l’étais pas. Et je n’étais pas comme mes frères. Je grandis alors en me contentant de résultats moyens, avançant sans vraiment savoir où j’allais, me laissant emporter par un sentiment de désarroi.
Ce sentiment, j’ai pu l’avoir dès la 5 ème. Je continuais pour ne pas décevoir ma famille, pour ne pas être le raté. Je voyais l’école comme une échappatoire au fait que je sois le raté. Jusqu’en troisième, mon état d’esprit n’avait pas changé. Je le faisais pour ma famille d’où ce sentiment de tristesse qui s’accumulait en moi.
Vint alors là période du lycée. Je voulais aller en filière professionnelle mais je devais suivre la voie générale. La filière professionnelle me correspondait davantage étant donné que je voulais travailler au plus vite pour pouvoir dépendre de moi même. Les premières disputent éclataient parce qu’on était pas d’accord. Je voulais mon bien être en filière professionnelle mais ce n’était pas envisageable. Ne voulant plus travailler et ayant un dégoût du travail, je me mis petit à petit ma famille à dos.
C’était l’effet boule de neige parce que plus je ne travaillais pas plus. Je rentrais alors en conflit avec ma famille, et je travaillais encore moins. Les disputent s’enchaînaient, j’étais privé de téléphone et de sortie. Je n’estimais avoir plus aucune liberté et en pleine crise d’adolescence, je me posais de plus en plus de questions sur moi même et mon état psychologique. Je n’en pouvais plus.
J’ai craqué et un jour, j’ai décidé de refuser de donner mon téléphone quand je rentrais à la maison après l’école. De là, ça a dégénéré et c’est parti beaucoup trop loin.
Je me suis empressé de quitter la maison et d’aller chez mon ami. Je ne voulais plus rentrer chez moi et j’ai donc été placer en foyer. Ceci amenant cela, je me retrouvais un soir en foyer pour adolescents. Tous les liens avec ma famille étaient coupés.
Je me suis alors retrouvé pour la toute première fois de ma vie dans un univers qui m’étais inconnu. Le foyer se situait à deux heures de mon lycée, en banlieue parisienne. La plupart des jeunes étaient déscolarisés, certains en bas âge abandonnés par leurs parents et d’autres connus des services de police. Le personnel était en revanche très professionnel et très attentif aux moindres détails.
C’était très difficile à gérer car je n’avais pas l’habitude et j’ai dû acquérir une autonomie, celle qui me manquait pendant toute ma scolarité. Cela a duré plus de deux mois. Mon baccalauréat de français en a fait les frais. Les éducateurs l’avaient vu, le savaient, tout le monde le savait, je n’étais pas comme les autres. Je n’avais pas les mêmes projets de vie et la même mentalité. Les autres jeunes n’allaient pas à l’école, consommaient de la drogue et manquaient de respect constamment. J’ai une scène en tête ou un jeune avait frappé à la tête un éducateur et la police était venue.
Cela a provoqué un véritable électrochoc en moi et je savais à ce moment-là ce que je voulais être, du moins ce que je ne voulais pas être.
Je voulais avancer et ne pas être assimilé à une personne sans avenir. Une motivation soudaine a commencé à voir le jour. J’étais déterminé à avancer et je voulais gagner de l’argent pour ne pas finir dans une détresse psychologique. Selon moi, le lien entre argent et état psychologique est très important parce qu’on dit que l’argent ne fait pas le bonheur mais je suis persuadé qu’il il contribue énormément. Les heures me paraissaient des jours et les jours des mois. Je n’étais pas à ma place.
Je suis finalement rentré à la maison après être passé par le juge pour enfant à Versailles. Je n’ai pas parlé à mes frères durant 1 an à la suite de cette épreuve. Mais je savais que cela finirait par passer. J’acceptais les choses et aucun mots n’étaient échangés entre nous, même pour se demander du pain. Ce n’était que les conséquences du fait que je sois parti. Un problème de leur point de vue mais une solution du mien.
Cela a cependant évolué au fil du temps, et nous apprenions à nouveau à cohabiter. Comme quoi, le temps guérit les blessures et aujourd’hui, tout va très bien avec ma famille et je suis très heureux. Nous sommes plus soudés que jamais et nous avons une complicité qui donnerait envi.
Ayant aujourd’hui une toute autre philosophie de vie et savant là où je voulais aller, ma vie a changé. J’ai effectué un DUT et je suis actuellement en double cursus classe préparatoire ATS et licence 3 AES. Épanoui dans ce que je fais, j’envisage une poursuite d’études en école de commerce car elles sont très réputées mais aussi car la charge de travail y est moindre une fois que l’on parvient à y rentrer (mon instinct primaire reprend le dessus).
Je suis encore quelqu’un de procrastinateur, aimant le goût de la contemplation et de la légèreté. Mais, je n’oublie pas ce que j’ai vécu… Il reste comme une signature ce sourire triste aux lèvres. 🙂