Depuis que je suis entrée à l’école, j’ai toujours été une « bonne élève ». J’avais pour habitude d’obtenir des notes excellentes, ce qui rendait mes parents fiers, mes professeurs impressionnés et mes camarades admiratifs. Réussir à l’école était devenue une partie inhérente à ma personnalité. J’étais très investie dans mon travail pour qu’il soit le meilleur possible dans les moindres détails.
Pour autant, je n’étais pas sûre de moi, et au fond, j’étais terrifiée à l’idée d’échouer. Echouer signifiait que l’image que j’avais de moi-même et que je renvoyais aux autres s’effondrait, celle de la première de la classe qui avait un avenir brillant devant elle. Si j’échouais, alors tout le monde allait voir qui j’étais réellement : une personne ordinaire, avec ses failles, qui avait jusqu’alors seulement eu un peu plus de chance. Je savais que je n’allais pas pouvoir éviter l’échec éternellement. Mais je ne me doutais pas que ça allait être aussi brutal.
Ainsi, pleine d’ambitions et sensible aux enjeux actuels, j’avais pour objectif de faire carrière dans la politique. Je me sentais capable de me battre pour monter les échelons, faire ma place et faire entendre ma voix. En terminale, j’ai donc candidaté pour entrer à Sciences po Paris, dans l’espoir que le jury soit lui aussi ébloui par mes résultats scolaires, incapable de voir mes doutes et mes peurs.
J’ai passé la première sélection, mes écrits ont séduit l’école et je dois alors passer une épreuve orale. Etant assez discrète, m’exprimer est une épreuve à part entière. La panique m’a submergé, comme si j’avais perdu la capacité de réfléchir et de développer ma pensée, comme si j’étais un robot. Mon anxiété m’a empêché de montrer ce dont j’étais réellement capable. Je me sentais nue face à ce jury, qui a pu voir derrière les murs de réussite académique qui me servaient d’abri face au regard des autres. Lorsque j’ai eu les résultats, une immense déception m’a envahi. C’est alors tout un rêve qui s’écroule.
C’est alors pour moi le moment de me remettre en question; « Est-ce-que la politique c’est vraiment fait pour moi ? Est-ce- que j’ai les ressources pour m’orienter dans ce domaine ? ». Ces questions m’ont hanté un certain temps, sans trouver de réponse. Je me suis alors sentie désarmée, impuissante. J’avais tellement espoir de pouvoir intégrer cette prestigieuse école que je n’avais pas osé imaginer y être refusée. Le concours de Sciences po Paris en licence n’est accessible qu’aux futurs bacheliers. Je ne pouvais donc pas le retenter. J’étais obligée d’abandonner mon souhait le plus cher, l’objectif que je m’étais fixée des années plus tôt.
Vient le moment de choisir une formation. Ce refus, c’est une porte qui se ferme, mais un champ infini de possibilités qui s’étend devant moi. Je me sentais perdue, et j’hésitais à poursuivre des études de sciences politiques compte tenu de la diversité des options que j’avais. Après une longue réflexion, je décide d’étudier la gestion d’entreprise en alternance. Ce cursus, offrant de nombreux débouchés, m’a semblé mieux me correspondre, montrant un fort intérêt pour l’analyse des évolutions de l’économie.
J’ai commencé la formation sans attentes particulières. A mon grand étonnement, je me suis rapidement épanouie. Décrocher mon premier emploi et entrer à l’IUT m’a permis de rebondir après mon échec, et de reconsidérer mes possibilités de parcours.
J’ai ainsi eu l’opportunité de découvrir le métier de gestionnaire de sinistre dans le secteur de l’assurance, possibilité que je n’aurais pas considérée si j’avais été à Sciences Po. A cette découverte s’ajoute mes études de gestion, qui me permettent de comprendre leur fonctionnement sous différents angles, que ce soit au niveau juridique, comptable, financier, sociologique ou encore des ressources humaines et du management. Cette expérience m’a donné l’occasion de découvrir un domaine qui me correspond réellement, et donc de trouver ma voix.
Ajouté à cela, suite à la torture qu’a été l’épreuve orale pour moi, j’ai pris la décision de combattre ma timidité et ma peur du regarde des autres, de prendre confiance en moi, mais aussi d’être moins perfectionniste. Après cet échec brutal, et cette immense déception, l’échec ne me fait plus tard. Je préfère prendre le risque de me lancer dans mes projets, et je ne laisse plus mes doutes me paralyser.
En effet, en choisissant la voie de l’apprentissage, j’ai été confrontée à de nombreux refus de plusieurs entreprises avant de décrocher mon premier entretien d’embauche. Cette rencontre avec mon possible futur manager a été pour moi l’occasion de me prouver que j’étais capable de mettre en avant mes qualités, de développer une réflexion sur ma personnalité. J’ai d’ailleurs réussi à obtenir le poste après cet entretien.
Je retiens de ce passage assez difficile qu’un échec n’est jamais définitif, et que c’est une expérience certes douloureuse, mais qui nous oblige à ouvrir notre esprit, à chercher d’autres opportunités autour, et à prendre un autre chemin, qui peut nous satisfaire beaucoup plus. C’est aussi une façon de se rendre compte de nos faiblesses, pour qu’on s’en serve et les transforme en force. L’échec est un tremplin vers une réussite encore plus belle. Cette expérience m’a renforcé et m’a permis d’affirmer ma singularité, de gagner en estime de moi, de faire preuve de flexibilité et d’ouverture d’esprit face à nos moyens et nos possibilités.